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Derrière des monuments du CNDD FDD, des messages parfois « provocateurs »
lundi 9 Gitugutu 2017, par
Ces dimensions vont diminuant à chacun de ses trois niveaux. Les faces sont peintes aux couleurs nationales : le blanc, le rouge et le vert. Au sommet trône un aigle, symbole du parti au pouvoir, le CNDD-FDD.
Une vieille mère s’arrête pour lire le message sur chaque face de ce monument : « Intwari ziriho kandi zizokwamaho » (Des vaillants existent et ont toujours existé), « Haduga, hamanuka, hanyerera, tuzobasongako » (Sur une montée, une descente ou même un terrain glissant, nous fonceront sur eux), « Intumva zamyeho kuva kera », (Ceux qui font toujours la sourde oreille ont toujours existé).
La veille maman hocha la tête en signe de désapprobation. Et de laisser éclater : « Le parti CNDD-FDD se comporte comme s’il était en guerre. Il brûle d’envie d’écraser toute personne qui aurait le culot de se mettre en travers de son chemin. De tels messages inquiètent. »
Monument du genre en zone Buterere, message pas tellement dans la même veine. « CNDD-FDD hangama ku ngoma » (CNDD-FDD, longue vie au pouvoir). Un jeune militant qui se réclame être de la coalition Amizero y’Abarundi, aile d’Agathon Rwasa lâche: «Le message sur ce monument est apparemment anodin. Il ne provoque pas tellement ceux qui ne sont pas de la mouvance ». Et de glisser : « Nous faisons tout pour éviter leurs auteurs. »
Un taximan qui suivait le témoignage précisera que biens des gens optent pour simuler une adhésion au parti au pouvoir.
Même avec des messages positifs, les monuments font peur à certains
Zone Cibitoke. Jonction 10ème avenue et l’Avenue des Forces Armées connue sous « Ku rya Kanyoni », quartier naguère dit « contestataire ».
Pour bien des gens, le monument qui y est érigé passe pour une curiosité. Pourtant, le message sur ce monument est positif : « Abarundi ntidusangiye umugambwe, ariko dusangiye igihugu kandi turi abavukanyi, Umoja wetu ndiye nguvu zetu » (Les burundais ne militent pas dans un seul parti, mais nous avons le pays en partage et nous sommes tous des frères. Notre unité, c’est notre force).
Un pasteur affirme que bien de ses fidèles ont la frousse devant ce genre de monuments qui passent pour eux pour des « idoles » (Ibigirwamana).
Un militant du CNDD-FDD dans ce quartier aura de la peine à faire comprendre aux gens que les messages sur les monuments sont adressés aux putschistes. Et pour preuve, sur chacun d’eux est écrit : « 13 mai 2015, date inoubliable ». Ici, on se rappelle du coup d’Etat manqué contre le président Nkurunziza.
« Le parti sera dorénavant attentif aux messages sur les monuments »
Côté administration, beaucoup de responsables estiment « inoffensifs » les messages sur les monuments. Mais un élu à la base au quartier Buyenzi reconnaît le caractère « provocateur » de certains messages. « J’ai réussi à convaincre les Imbonerakure de les effacer pour les substituer par des textes positifs ». Et de révéler qu’il a ordonné que ces monuments ne soient plus érigés à l’intérieur de son quartier. « Nous redoutons qu’un jour, des enfants jouant dans la rue ne gribouillent ces monuments, ce qui pourrait déclencher l’ire des Imbonerakure sur tous les enfants des environs ».
Au niveau de la représentation nationale du parti au pouvoir, le Secrétaire Général Evariste Ndayishimiye tranquillise. D’abord une mise au point : chaque parti peut ériger ses propres monuments, dira-t-il. Ensuite, le parti va s’atteler à la constitution d’un répertoire de messages à inscrire sur les monuments à ériger et promet la mise sur pied d’une commission ad hoc.
Egide NDUWIMANA